Résumé de l'article
Paul
Moreau,
Penser le droit de la famille avec Michel Villey
Dans son aspect intempestif, la pensée de Michel Villey est très précieuse aujourd’hui pour mettre en garde contre une conception du droit de la famille qui se réduirait à la seule mise en forme des droits des individus. Elle permet de comprendre en quoi cette conception, marquée par le subjectivisme juridique s’enracine dans une philosophie qui, héritière du nominalisme, nie toute dimension ontologique aux communautés comme la famille ainsi qu’aux relations familiales dans leurs spécificités (paternité, filiation, fraternité, différence des sexes) et prétend, depuis les seuls principes d’égalité et de liberté, penser la relation à partir du simple contrat. La famille n’est plus alors une communauté naturelle d’intérêt, organisée de façon hiérarchique et harmonieuse, elle est le lieu de l’expression et de la revendication des droits de chacun et par là de leur antagonisme quasiment nécessaire. À propos de la famille trois aspects du droit contemporain sont ici considérés : la judiciarisation de la vie familiale ; la montée de l’individualisme dans la famille et du rôle prépondérant de la volonté dans la mise en place des relations intrafamiliales ; la confusion entre ces ordres que sont le droit, et la loi. Pour terminer l’auteur s’interroge sur les limites de la pensée de Michel Villey quant à la façon de penser l’avenir du droit de la famille : ne faudrait-il pas, en particulier, que soit précisée plus nettement la correcte articulation entre le droit, la loi civile, la morale ? Par ailleurs, au-delà de la conception naturaliste qui est celle de Michel Villey, et de la conception contractualiste qu’il critique, ne faudrait-il pas considérer la famille comme objet de pensée, spécialement comme institution de la république ?
Mots-clef : Famille, subjectivisme, judiciarisation, individualisme
t. 50, 2007 : p. 331-342