Résumé de l'article

Frédéric Zenati, L'immatériel et les choses
La dématérialisation du droit est liée à l'évolution de l'économie. Pour autant, elle n'est pas linéaire à cause des vicissitudes accompagnant l'élaboration des représentations juridiques. En témoigne la matière des biens, qui a commencé de s'éloigner de la réalité physique depuis longtemps, mais dont l'évolution vers l'intemporel a été occultée par la récurrence du corporalisme. L'idée que les choses sont nécessairement des corps n'est pas romaine mais romaniste et l'idéalisme moderne n'a pas su se départir de cette tradition malgré sa propension à l'abstraction. C'est l'avènement de la société industrielle qui, par l'extension de l'appropriation qu'elle a provoquée, a rendu intolérable cette restriction et fait sauter le verrou. Par l'extension paroxystique qu'elle donne par ailleurs à la valeur, cette société fait découvrir que la valeur gisait dans le droit depuis toujours sans qu'on s'en soit aperçu, révélant entre lui et l'immatériel l'existence d'une complicité structurelle.

Mots-clef : dématérialisation, corporalisme, chose
t. 43, 1999 : p. 79-95