Résumé de l'article

Roger Arnaldez, La loi musulmane à la lumière des sciences coraniques
L'Islam appelle "Loi" toute révélation. Au sens juridique du mot, il s'agit des prescriptions de tous ordres, révélées par l'intermédiaire d'un Envoyé (Rasûl) et en ce sens le Coran compte essentiellement trois lois, celle de Moïse, celle de Jésus et celle de Muhammad. Les deux premières sont "abrogées" , seule la loi coranique durera jusqu'à la fin des temps.@Mais quelle est donc cette loi, entendue au sens juridique du mot, dont les musulmans semblent attendre la solution de tous les problèmes ? En fait, le Coran ne contient qu'un tout petit nombre de versets explicitement juridiques. Les juristes (fuquahâ') ont développé tout un droit, en se fondant sur les ressources du commentaire, sur les traditions prophétiques, sur certaines méthodes de raisonnement, telles que l'analogie. En fait, les spécialistes des "principes du droit" (les usûliyyûn) se sont contenté d'islamiser des règles de droit empruntées à des systèmes non musulmans (droit romano-byzantin, persan, voire rabbinique). Il suffit pour s'en convaincre de comparer les nombreux titres des questions traitées dans les ouvrages des grands juristes, avec les maigres données du Coran et de la tradition, tant du point de vue du fond, que du point de vue du vocabulaire. C'est donc ce procédé d'islamisation qui a permis en fait au fiqh musulman de se constituer dans le passé, et de se développer de nos jours. Il semble qu'il restera le seul vraiment utile et praticable. On se demande comment les islamistes, qui veulent se contenter des données coraniques et prophétiques, pourraient légiférer pour un État moderne et résoudre par elles seules, sans emprunts plus ou moins camouflés, tous les problèmes si complexes qui se posent de nos jours à nos sociétés.

Mots-clef : religion, Coran, musulman
t. 38, 1993 : p. 83-91